La municipalité de Paris a orchestré ce dimanche un vote populaire concernant l’imposition fiscale des véhicules de grande taille en plein cœur de la ville. Des initiatives analogues ont été précédemment mises en place à Londres et Stockholm, et nos représentants sur place nous fournissent plus de précisions à leur sujet.
Paris, Londres, Stockholm : les grandes villes se mobilisent contre les véhicules polluants
Le dimanche 4 février, les habitants de Paris ont voté en faveur du triplement du tarif de stationnement pour les automobiles les plus polluantes dans le centre de la ville. Cette initiative n’est pas unique, car plusieurs pays européens ont déjà mis en place des mesures similaires. Par exemple, depuis 2015, la ville de Londres a instauré une zone à très faibles émissions qui exclut les véhicules les plus polluants du centre-ville, ce qui a conduit à l’émission de nombreuses amendes pour les touristes non informés de cette réglementation.
La Suède, de son côté, sera la première nation au monde à interdire aux véhicules à moteur thermique de circuler dans le centre de sa capitale. Cette interdiction entrera en vigueur à Stockholm le 31 décembre 2024. En matière de décarbonisation des transports, le pays est en avance sur ses objectifs.
Londres : expansion prévue de la zone à très faibles émissions
Depuis 2015, la municipalité de Londres a défini une zone à très faibles émissions, également connue sous le nom d’Ultra Low Emission Zone (ULEZ). Dans cette zone, les conducteurs de véhicules fortement polluants doivent s’acquitter d’une taxe quotidienne pour pouvoir circuler. Cette zone couvre actuellement l’ensemble du centre de Londres, incitant ainsi les résidents et les entreprises à abandonner les véhicules très polluants au profit de modes de transport plus respectueux de l’environnement.
Lors de son introduction, cette mesure a été accueillie avec réticence. Cependant, c’est l’extension prévue de cette zone par le maire de Londres, Sadiq Khan, qui suscite actuellement le mécontentement. En effet, la zone devrait être élargie à l’ensemble du Grand Londres, soit une zone de 1 500 km2 abritant 9 millions de personnes. Une pétition en ligne a recueilli 257 000 signatures et des manifestations ont eu lieu dans la rue.
Les touristes qui traversent le centre de Londres avec des véhicules très polluants sont souvent surpris de recevoir des amendes une fois rentrés chez eux, n’étant pas toujours au fait de la législation locale. Londres est la ville la plus surveillée du monde, avec près de 6 millions de caméras de vidéosurveillance installées sur le territoire britannique au cours des 30 dernières années, notamment aux feux rouges des zones à faibles émissions.
320 000 amendes adressées à des citoyens de l’UE
Depuis le Brexit, le Royaume-Uni n’a plus accès automatiquement aux données personnelles des résidents de l’Union européenne. Par conséquent, les conducteurs étrangers ne devraient pas recevoir d’amendes. Cependant, selon les gouvernements, des centaines de milliers de citoyens de l’UE ont reçu des amendes pour avoir conduit dans l’ULEZ à Londres. En effet, la ville de Londres a été accusée par cinq pays européens d’avoir illégalement obtenu les noms et adresses de leurs citoyens pour émettre plus de 320 000 amendes depuis 2021.
Les pays concernés sont la Belgique, l’Espagne, l’Allemagne et les Pays-Bas. En France, plus de 100 conducteurs ont intenté une action en justice, affirmant que leurs données avaient été obtenues frauduleusement. Certains décrivent ce scandale comme l’une des plus grandes violations de données de l’histoire de l’Union européenne.
Le porte-parole des libéraux démocrates pour les transports à l’Assemblée a demandé l’ouverture immédiate d’une enquête, arguant que ce problème de données et la taxation des conducteurs étrangers pourraient nuire à la réputation d’accueil de la capitale britannique pour les visiteurs. Londres reçoit près de 20 millions de visiteurs internationaux par an, dont 10% arrivent via le Shuttle, le tunnel sous la Manche qui transporte les passagers et leurs véhicules.
Suède : objectif amélioration de la qualité de l’air et réduction du bruit
En Suède, les véhicules thermiques seront interdits dans le centre-ville de Stockholm à partir de fin 2024. Cette zone se limite à la partie la plus dense de la capitale, autour de la gare. Elle est délimitée par quatre rues et comprend une vingtaine de pâtés de maisons, ainsi que le tunnel Klara, une grande artère souterraine de 850 mètres de long qui traverse le centre-ville du nord au sud.
La zone n’est pas très étendue, mais elle devrait améliorer significativement la qualité de l’air. Une étude du Karolinska Institutet a démontré que les enfants qui grandissent dans les rues du centre ont des fonctions respiratoires plus réduites dès l’âge de six mois, par rapport à ceux qui vivent plus loin. C’est cet aspect de santé publique qui est mis en avant par la municipalité.
A partir de 2025, seuls les véhicules électriques pourront traverser Stockholm en passant par le centre-ville. Cette mesure devrait également contribuer à réduire le bruit. Actuellement, les livraisons nocturnes sont interdites à Stockholm pour préserver la tranquillité. Si les camions électriques sont plus silencieux, la ville envisage de permettre les livraisons nocturnes dans ce quartier d’affaires, ce qui pourrait désengorger le quartier pendant la journée.
La Suède est souvent considérée comme un exemple en matière de décarbonisation des transports. Le pays a instauré une taxe carbone dès 1991, qui est de loin la plus élevée au monde. Il a également interdit la vente de nouveaux véhicules thermiques à partir de 2030. Cependant, malgré ces mesures, le nombre de voitures diesel a explosé en 15 ans pour représenter aujourd’hui plus de 35% du parc automobile, contre 8% en 2007.
Le biocarburant fait débat
La hausse du nombre de voitures diesel en Suède s’explique par le fait qu’elle est considérée comme une option plus écologique que le gasoil, car le diesel suédois contient en moyenne 30,5% de biocarburant. Grâce à la part des biocarburants dans le secteur des transports, les émissions totales de CO2 du pays ont diminué d’environ 7% chaque année.
Cependant, le biodiesel émet autant, voire plus, d’oxydes d’azote, qui provoquent des irritations respiratoires. C’est pour cette raison que la circulation des véhicules diesel sera interdite à Stockholm. De plus, le gouvernement de droite, arrivé au pouvoir l’année dernière, a décidé de réduire les taxes sur le diesel et de diminuer la part de biocarburants dans le mix pour satisfaire les automobilistes qui trouvaient le prix à la pompe trop élevé.
Cette année, la Suède a aligné sa réglementation sur celle de l’UE, qui prévoit un taux de biocarburants de 6% dans le mix diesel, soit cinq fois moins que le taux précédemment en vigueur en Suède. Cette mesure met en péril l’objectif climatique du pays de réduire de 70% ses émissions dans le secteur des transports d’ici 2030. Le pays pourrait donc perdre l’avance qu’il avait prise en matière de décarbonisation des transports.
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