En 2019, la Commission européenne a dévoilé le Pacte Vert, insufflant un nouvel élan à la bataille contre le réchauffement climatique en Europe. Cependant, cinq années après, ce Pacte fait l’objet de nombreuses contestations. Quelle est la source de ce bouleversement ?
Introduction
Le 20 août 2018, à Stockholm, une adolescente de 15 ans, Greta Thunberg, décide de faire grève pour protester contre l’indifférence des gouvernements face à la crise climatique. Installée devant le parlement suédois, sa pancarte « grève scolaire pour le climat » devient rapidement le symbole d’une mobilisation internationale. Que ce soit à travers les manifestations pour le climat ou ses discours dénonçant l’inaction des dirigeants mondiaux, Greta Thunberg attire l’attention des médias et inspire des milliers de jeunes.
Dans le même temps, Ursula von der Leyen, alors ministre de la Défense en Allemagne et favorite pour succéder à Angela Merkel, voit son avenir politique évoluer suite aux élections européennes du 26 mai 2019. Les partis écologistes, soutenus par la mobilisation des jeunes, connaissent un essor important, notamment en France où la liste des Verts, menée par Yannick Jadot, se positionne à la troisième place avec 13,6% des voix. Comme le souligne Jadot, une vague verte déferle sur l’Europe.
Le début du Green Deal
Suite à ces élections, un nouveau président de la Commission européenne doit être désigné pour remplacer Jean-Claude Juncker. Ursula von der Leyen, issue de l’aile gauche du Parti Populaire Européen (PPE), est choisie en juillet 2019. Avec Frans Timmermans à ses côtés en tant que premier vice-président chargé de l’environnement, ils vont porter le Green Deal européen. Ce projet, présenté le 11 décembre 2019, vise à répondre à la mobilisation des jeunes par une législation ambitieuse en matière de changement climatique.
Pascal Canfin, élu député européen, est nommé président de la Commission environnement du Parlement. Il explique que les élections européennes 2019 et les mobilisations de la jeunesse en Europe ont placé le climat en haut de l’agenda politique. A cela s’ajoute les manifestations concrètes de l’impact du changement climatique, comme les incendies de forêt, les sécheresses, les inondations, les canicules, etc. C’est dans ce contexte que le Green Deal est lancé, avec pour objectif une réduction de 50% des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 et la neutralité carbone en 2050.
Le Green Deal en action
Le Green Deal comprend une cinquantaine de mesures visant à décarboner l’économie européenne dans tous les secteurs : énergie, déchets, économie circulaire, marché du carbone, etc. En juillet 2021, la Commission propose douze mesures, rassemblées sous le label ‘Fit for 55’, pour atteindre ces objectifs. Parmi elles, la réforme du marché du carbone européen, une taxe carbone aux frontières pour les biens importés et la stimulation des investissements dans les énergies renouvelables, notamment l’hydrogène.
Les premiers obstacles
L’invasion de l’Ukraine par la Russie provoque une accélération de l’adoption du volet énergétique du Green Deal. Les Européens dépendent encore beaucoup du gaz russe et ne peuvent pas se permettre de s’en passer sans mettre leur propre économie en difficulté. La dépendance aux énergies fossiles est alors perçue comme une faiblesse géopolitique, ce qui relance l’idée d’une politique énergétique commune.
Cependant, l’interdiction de vente des voitures thermiques sur le marché européen à l’horizon 2035 fait l’objet de tensions. Le secteur du transport routier est responsable d’un cinquième des émissions de gaz à effet de serre, et ses émissions n’ont guère diminué depuis 1990 : elles ont même augmenté de 25%. Les constructeurs automobiles européens craignent d’être moins compétitifs, surtout face aux constructeurs chinois qui ont massivement investi le marché de l’électricité.
Manifestations des agriculteurs
L’opposition au Green Deal se cristallise principalement autour des tensions agricoles. Tout commence aux Pays-Bas en 2019 avec l’émergence du Boer Burger Beweging (BBB), un petit parti rural et populiste qui proteste contre le plan azote du gouvernement néerlandais. Ce plan impose davantage de contraintes aux éleveurs de porcs et envisage une réduction de la taille du cheptel. Contre toute attente, le BBB devient le premier parti du pays aux élections provinciales de 2023 et fait son entrée au gouvernement en mai 2024, avec l’extrême droite de Geert Wilders.
Conclusion
Le Green Deal survivra-t-il aux attaques des populistes ? Pascal Canfin reste confiant. Selon lui, nous entrons maintenant dans une nouvelle phase du Green Deal, celle de la bataille industrielle et technologique. Malgré les tensions, l’objectif est de gérer ces dernières afin de réussir à atteindre les objectifs fixés. Le Green Deal sera-t-il le socle d’un nouveau projet démocratique européen, ou une nouvelle tentative avortée de développer une politique ambitieuse sur le climat ? Seul l’avenir le dira.
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